On a désormais à notre disposition tous les éléments de pensée qu’il faut pour éclairer le passage considéré comme le plus fuligineusement antisémite des Carnets noirs :
« L’aître1 à l’état pur du monde grec, c.-à-d. l’étant au milieu duquel les Grecs, tout en en étant, ont été étrangers — cet étant, et eux-mêmes, et le rapport de l’Être à ces derniers —, le montrer et l’éprouver en son aîtrée simple, à partir de l’alètheia. Le mythos & logos — chacun de ces deux mots et figures pris strictement, mais non pas de manière forcée <erzwungen> ni schématiquement pédante —, en faire l’épreuve à partir de l’alètheia.
Il nous faut chaque jour à neuf laisser reposer le regard dans l’Indestructible <Unzerstörbaren>. C’est de ce repos que surgit tout mouvement. »
D’emblée, à la première ligne du paragraphe 29 des Anmerkungen I, Heidegger évoque la Griechentum, à partir de quoi il va, en un contraste qui n’est pas antagonique – et d’une certaine manière se dérobe à tout antagonisme –, pouvoir en un second temps évoquer la Judentum et la ribambelle de convulsions antagoniques qui, émanant d’elle (du judaïsme), ne peuvent aboutir qu’à une apothéose de destruction.
Qu’entend ici Heidegger, pour commencer, par la pure essence du monde grec qui est l’étant auquel les Grecs sont demeurés « étrangers » « tout en en étant », ce qui est logique puisque tout ce qui est est étant.
Heidegger a ici en vue ce qui fait des Grecs les moins « juifs » des hommes – « juifs » selon sa conception scotomisée du judaïsme –, c’est-à-dire les moins soumis à la conception objectivante du monde.
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