Il faut, pour tâcher de penser l’Extermination, s’obliger à en passer par là, pour la bonne raison que tous les récits et les explications des victimes – aussi poignants et puissants soient-ils –, précisément parce qu’elles ne s’expriment pas depuis le cœur de l’imperium ni depuis l’aître de la destruction, n’éclairent pas le pourquoi de ce type d’événements (les génocides), dont la norme même est hors-norme, dont l’anormalité couve, pendant des siècles parfois, sous toutes les normalités qui la déguisent et la dissimulent.
Inutile de dire que nous vivons une époque comparable, lorsque l’anormalité pointe depuis belle lurette le bout de son abjection et se met à tout régenter, et à bouleverser tout l’équilibre du monde que l’on croyait fragilement acquis.
Le survivant de l’extermination, parce qu’il est essentiellement innocent de ce qui lui est arrivé, ne peut comme Primo Levi que poser la question : « Pourquoi ?», à laquelle le bourreau refuse de répondre.
Écoutez bien cet extrait d’un récent entretien radiophonique1 du traducteur allemand Georges-Arthur Goldschmidt (que je surnomme GAG, vous allez vite comprendre pourquoi), issu d’une famille juive allemande convertie depuis trois générations au protestantisme. Vous y constaterez comme la confusion sur ces sujets est universelle, et non l’apanage de Heidegger.
Extrait 1:
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