Autre passage du Zohar, qui déploie une nouvelle métaphore pour décrire différemment la relation entre les consonnes, les voyelles et les teamim dans la Torah. Cette fois-ci, c’est à partir du verset du Cantique des Cantiques (1, 11) qui dit : « Nous te ferons des colliers d’or, Avec des points d’argent. »
Le mot « points » neqoudot désigne précisément aussi les points-voyelles dans la grammaire hébraïque. Mais ici, c’est le mot boucles, torey, qui est assimilé en particulier à un taam, indiquant une conjonction, toujours placé à la fin d’un mot, nommé le « petit telicha » et qui a la forme d’un anneau :
« "Boucles d'or" (Cantique 1:11): parce que les signes de cantillation sont suspendus aux lettres comme des boucles ornées pendent aux oreilles. Ainsi du talcha et des autres mouvements des boucles et des anneaux constituant les parures des lettres. Des mots sans signes de cantillation et donc dépourvus de mouvement seraient comme les oreilles d'une jeune épouse sans boucles et sans ornements, démunies de parure. Des mots sans points-voyelles seraient comme une femme sans vêtements, qui ne peut aller nulle part dans le monde. »1
Le mot taam (téamim au pluriel), qui désigne l’intrigante accentuation pour la cantillation biblique, apparaît avec la manne, au chapitre 16 de l’Exode. Il signifie littéralement le « goût », la « saveur» : « Elle avait la saveur (םעט) d’un gâteau de miel.». Ce n’est cependant pas sa seule occurrence ni son seul sens. Taam signifie également le « jugement », le « bon sens », la « raison ». C’est en ce sens qu’il est employé, par exemple, dans les Proverbes : « Le paresseux se croit plus sage que sept hommes qui répondent avec bon sens (taam). » Ou bien : « Un anneau d’or au nez d’un pourceau, c’est une femme belle et privée de bon sens (taam). » Dans le Talmud, des « paroles sensées » se disent « paroles de taam ». Les Docteurs du Talmud emploient encore le mot téamim pour signifier qu’un terme ou une expression admet plusieurs significations.
Spinoza, lorsqu’il discute des téamim dans le Compendium, adopte la même conception absurde, rabougrissante, utilitariste, androïdesque même qu’il se fait de la langue, et il fait le même reproche aux téamim qu’à la langue hébraïque en général, son ambiguïté consubstantielle :
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