Qu’est-ce que le cogito ?
« Au début de la philosophie moderne », explique Heidegger dans le Nietzsche, « se trouve la proposition de Descartes : Cogito, ergo sum (‘‘Je pense, donc je suis’’). Toute conscience des choses et de l'étant dans sa totalité se voit ramenée à la conscience de soi-même du sujet humain en tant que le fondement inébranlable de toute certitude. »1
À quoi Pascal rétorque dans la Pensée 457:
« Il ne faut pas juger de la nature selon nous, mais selon elle. ».
Or pour Pascal, on l’a vu, la nature est zigzagante ; il ne s’agit pas de l’appréhender more geometrico – de l’arraisonner, dirait un heideggérien –, comme s’y acharne la science, mais de la suivre (au sens où l’on suit un rythme), et cela ne se peut que par une pensée par bonds, non selon la « droite méthode ».
La critique de Descartes par Pascal est donc beaucoup plus fine – elle repose sur l’esprit de finesse – que ne la décrit Heidegger. En un sens, elle le préfigure.
Si Descartes est « inutile et incertain », c’est parce que l’utilité et la certitude de sa méthode sont illusoires, pas parce qu’elles contreviennent à la foi chrétienne.
« S’il ne fallait rien faire que pour le certain, on ne devrait rien faire pour la religion ; car elle n’est pas certaine », énonce la Pensée 234.
Ainsi, c’est la première pensée de la classification Brunschvicg2, que Heidegger ne peut pas ne pas avoir eu sous les yeux, consacrée à ce que Pascal a génialement qualifié d’«esprit de finesse » qui permet aussi de comprendre le sens de sa formule sur Descartes qui ulcère tant Heidegger :
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